Dans les rues de la cité, de nombreuses horloges en panne induisent les touristes en erreur. La réputation de la ville en prend un coup.
Il est midi à Genève. C’est l’heure de pointe sur les terrasses investies d’une foule de banquiers, de touristes et d’étudiants. Il est midi, oui, mais pas partout. Rue des Alpes, à quelques pas de la gare, on a le choix. Deux magasins de montres, surmontés l’un et l’autre d’horloges bien visibles, proposent leur propre version du temps: 10h10 sur l’une, 2h40 sur l’autre.
En haut de la rue touristique du Mont-Blanc, une horloge en piteux état annonce quant à elle 10h50 depuis plusieurs années. Place de la Fusterie, c’est encore un autre son de cloche, ou plutôt pas de son du tout puisque le cadran de l’église est bloqué à 12h33. Et il y en a bien d’autres, à Genève, de ces horloges publiques qui ont rendu l’âme et qui continuent à induire les passants en erreur. A proximité de la gare, elles ont sans doute provoqué plus d’un ratage de train…
Pour une ville tellement fière de son industrie horlogère, cette désinvolture a de quoi surprendre. Qu’en pensent les touristes qui viennent visiter la cité de Rolex tout imprégnés de clichés sur la précision et la ponctualité helvétiques? «Nous espérons que les montres qui sont vendues ici fonctionnent mieux que ces horloges arrêtées», plaisante, hilare, un couple de touristes indiens interrogé sur la rue des Alpes.
Et dire que Genève se flatte d’avoir offert 100 horloges à la Municipalité de Saint-Pétersbourg à l’occasion de son tricentenaire… N’aurait-elle pas dû d’abord mettre ses propres pendules à l’heure?
Dans l’administration genevoise, du secrétaire jusqu’au responsable de département, personne ne sait exactement qui gère les horloges sur la voie publique, ni même si quelqu’un y est préposé. Alerté par L’Hebdo, le maire André Hédiger admet que «c’est vrai que l’on peut se poser la question», et promet aussitôt d’effectuer un relevé de la situation.
Le directeur de l’Office du tourisme genevois, François Brillant, reconnaît que ces horloges en panne entachent l’image de la ville. «Cette situation est d’autant plus gênante que nous présentons volontiers Genève comme la capitale de l’horlogerie. Cette image est très forte dans notre communication, et nous entendons la préserver. Par conséquent, s’il y a des failles, nous allons y remédier», promet-il.
Mais comment? La plupart des horloges présentes sur la voie publique appartiennent à des commerçants qui n’ont pas tous la rigueur ou les moyens nécessaires à leur entretien. Qui pourra les contraindre à réparer leurs mécaniques? «Même les magasins d’horlogerie ont sur la rue des horloges qui ne marchent pas», déplore Pierre-Yves Cichocki, le président de la Société des horlogers de Genève, qui se dit impuissant face à ce problème. «Résultat, ajoute-t-il, les touristes se mettent à penser que la Suisse devient comme partout…»
Il se consolera en apprenant qu’à Saint-Pétersbourg, en tout cas, les horloges genevoises sont d’une ponctualité irréprochable.
