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De Chanel à Migros, la tyrannie de la transparence

Tout, désormais, doit s’offrir au regard d’autrui. Après la surenchère télévisuelle d’exhibitions volontaires et l’effusion confessionnelle, voici maintenant l’impératif d’ouverture des bagages en aéroport. Heureusement, les marques nous viennent en aide.

Les nouvelles normes de sécurité aérienne vont porter un coup de grâce aux arsenaux de produits secrets que sont les beauty-cases. On va enfin savoir ce que contient le sac d’une fashionista puisque Karl Lagerfeld a décidé de jouer désormais la carte de la transparence.

Son Naked Bag repéré sur le podium printemps-été 2007 permet aux voyageurs de passer la douane sans ouvrir leur sac. Entièrement plastifié, il revisite le fameux classique de la maison Chanel, le «2.55». Il est identifiable par son fermoir gravé du double C et son anse en chaîne entrelacée de cuir et de métal. Transparent certes, mais pas vraiment effacé!

Même verdict pour la marque Furla, dont le sac Rayons X clame à qui le regarde qu’il n’a rien à déclarer.

Mais les marques de mode ne sont pas les seules à s’adapter à la nouvelle réglementation aéroportuaire. Migros a également décidé de revisiter un ancien modèle, le Tangan No 2. Depuis le 6 novembre dernier, ce sachet de congélation que l’on trouve dans bien des congélateurs suisses s’est vu attribuer une étonnante nouvelle fonction.

Les passagers des avions ne peuvent emporter avec eux que des tubes et flacons d’un décilitre au maximum qui doivent être placés dans un sac plastique transparent d’une contenance d’un litre au maximum et dont l’ouverture est refermable. Quel modèle fait merveille? Le Tangan No 2, justement.

Ces sachets se vendaient déjà à raison d’un demi-million de boîtes par année. «Parions qu’avec la mise en place de ces nouveaux standards de douanes, les ventes vont encore augmenter», se réjouit-on dans tadalafil dose usual.

Le géant de la distribution ne propose pas seulement les sachets parfaits. Il entend bien remplir ceux-ci de ses produits cosmétiques et d’hygiène en format mini, correspondant aux nouvelles normes de sécurité. D’où son slogan «Passer la douane des aéroport avec Migros ne révélera aucune mauvaise surprise».

L’exigence de transparence semble sans limite, dans tous les domaines. Après la surenchère télévisuelle d’exhibitions volontaires, l’effusion confessionnelle et maintenant cet impératif d’ouverture des bagages en aéroport, on assiste aussi à une mode des bureaux transparents, ouverts sur la rue.

Et ceux qui travaille dans une entreprise transparente (à tous les sens du terme) aspirent à vivre dans des habitations qui le sont également. Les cubes de verre prolifèrent dans les nouveaux quartiers résidentiels où les rideaux sont presque devenus réactionnaires. La Suisse se hollandise avec Zurich qui montre l’exemple. Vivre en vitrine, c’est tendance. A qui parle d’exhibitionnisme, on répond par un procès en voyeurisme….

Jean-Claude Guillebaud dans «Le goût de l’avenir» consacre un chapitre à la transparence. Il y décrit l’émergence d’un homme sans secret, se soumettant de bonne grâce à la dictature du tout voir. «La nouvelle morale lui enjoint à dépasser la honte et la culpabilité pour s’offrir au regard d’autrui, d’où l’exposition frénétique de chacun au regard des autres.»

Finis, les espaces opaques? Paradoxalement, la plupart des architectes de ces constructions transparentes vivent, eux, dans d’anciennes maisons restaurées, aux murs épais et fenêtres aux dimensions modestes. Renoncer à l’intériorité matérielle et morale n’est pas sans danger. «L’homme sans intérieur est un homme désarmé», conclut Jean-Claude Guillebaud.

Jean Lacouture est venu partager son inquiétude: «Une société pourrit d’un excès d’ombre, une société peut pourrir aussi d’une surexposition, de rage panoptique», lit-on dans «cialis vancouver». Aujourd’hui, c’est un psychiatre et psychanalyste qui dénonce lui aussi la tyrannie de la transparence…

Dans un livre également intitulé «L’éloge du secret», Pierre Lévy-Soussan montre combien le «droit de savoir» est partout, remettant en cause jusqu’à l’anonymat qui s’attache au don d’organe, de gamètes, à la naissance sous X, parents et enfants sont sommés de «tout» se dire au détriment de leur indispensable jardin secret. Il réhabilite l’intimité qui joue un rôle essentiel dans l’équilibre de la vie psychique de tous les individus.

Rideau!