CULTURE

Mes initiales de A à Z et vice-versa

Avec ses tableaux de combinaisons alphabétiques, l’artiste bernois Martin Koncilja entend développer un réseau international. Vos initiales prennent de la valeur avec le temps.

On peut y voir un clin d’œil au marché de l’art, aux commissaires priseurs et aux enchères qui montent en flèche. Martin Koncilja préfère parler de projet communautaire.

L’artiste bernois vend des tableaux uniques représentant les 676 binômes possibles de l’alphabet, depuis AA jusqu’à ZZ, en passant par CH, DJ, OK, et VW. Plutôt austères, ces œuvres de 30 centimètres sur 30 ne contiennent que deux initiales peintes en bleu, beige ou noir sur fond blanc.

L’originalité est ailleurs: ces tableaux sont vendus par internet (sur le site www.artinitials.com, développé par l’artiste), à des prix qui ont débuté à 61 dollars et qui augmentent d’un dollar après chaque pièce vendue.

«En achetant tôt, les acquéreurs ne bénéficient pas seulement d’un bon tarif: ils contribuent à faire augmenter la valeur de l’ensemble des tableaux, et donc du leur», souligne-t-il.

Le webartist de 35 ans admet s’être inspiré du succès mondial de Milliondollarhomepage.com, un site publicitaire conceptuel qui a permis à son créateur de gagner un million de dollars en vendant des pixels à des annonceurs.

Pour sa part, Martin Koncilja a calculé qu’en écoulant toutes ses pièces, il peut espérer gagner près de 200’000 francs. Il table sur le potentiel participatif du Web 2.0. Les acquéreurs deviendront membres de la communauté en ligne, pourront placer leur photo sur le site et expliquer ce qui les lie aux initiales qu’ils ont choisies. Libre à eux de revendre les tableaux par la suite au plus offrant.

«Ce principe me fait surtout penser au site de vente aux enchères eBay, avec un côté léger et ludique en plus, remarque le commissaire d’exposition Simon Lamunière. Dans le marché de l’art, les collectionneurs forment très rarement une communauté et les publics restent souvent restreints.»

De son côté, Martin Koncilja dit proposer un concept plutôt que des chefs-d’œuvre. Pour lui, les tableaux servent avant tout de medium permettant de tisser la communauté d’internautes la plus large possible.

Avec le temps, le Bernois — qui fût notamment l’un des concepteurs de la carte Voie 7 pour les CFF — espère que son site acquérra une renommée internationale qui incitera les derniers venus, notamment des entreprises, à débourser jusqu’à 960 dollars pour acheter les dernière pièces disponibles.

Lancée au mois de janvier, son initiative romanesque avance pour l’heure modestement: la communauté de ArtInitials compte à ce jour quelques 44 adhérents.

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Une version de cet article est parue dans le magazine L’Hebdo.