Dessous-chics: Monsieur clique

«La moitié de nos clients online sont des hommes.» Richard Anselme, manager de La Lingerie Précieuse, marque de sous-vêtements de luxe pour femmes, constate une réalité: si les sites de vente de lingerie féminine connaissent un pareil succès, c’est aussi, voire surtout, grâce aux hommes.

Gênés en boutique, une partie importante de la gent masculine déteste acheter petites culottes, soutien-gorge et autres nuisettes pour leur compagne sous le regard scrutateur des autres clientes et des vendeuses. «Sur Internet, ils peuvent se lâcher, prendre le temps de regarder les photos à loisirs et même de zoomer sur le produit sans avoir l’impression d’être considéré comme une bête curieuse, poursuit Richard Anselme. Ils achètent ainsi deux ou trois pièces pour un panier moyen, de 180 à 220 euros. Et juste avant Noël, le nombre de commandes augmente de 30%.»

Selon le sociologue italien Salvino Salvaggio, l’embarras, voire l’anxiété, que ressentent les hommes dans une boutique de lingerie a placé la vente de sous-vêtements sexy parmi les secteurs à bénéficier le plus du commerce électronique. «Pour la plupart des messieurs, franchir le pas de ce type de magasin signifie s’aventurer dans l’univers inconnu de l’intimité féminine, dans lequel ils ne se reconnaissent pas, explique-t-il. En achetant ces produits, c’est davantage eux-mêmes qu’ils mettent à nus et non les femmes dont ils tentent maladroitement de décrire les goûts.»

Confortablement assis à la maison, derrière leur écran, les clients peuvent grâce au Net choisir sans rougir la dentelle qui correspond le mieux aux formes de leur compagne, et à leurs goûts à eux.

Pour les distributeurs online, les hommes représentent de nouveaux, et de bons clients. «Les messieurs achètent pour offrir, et comme ils connaissent très mal le monde de la lingerie fine, ils font surtout confiance aux grandes marques, poursuit Salvino Salvaggio. Les shops de lingerie en ligne disposent généralement de guides de tailles faciles à comprendre, qui prennent l’acheteur par la main afin de le mener au bon produit.»

En Suisse, Roland Stadelmann et Stefan Erzinger ont senti la tendance en créant, en 2001, Underwear24.ch. «Nous avions vu juste, se réjouit Stefan Erzinger. Nous avons atteint plusieurs millions de francs de chiffres d’affaire annuel. Si les femmes aussi adorent acheter leurs sous-vêtements en ligne pour le côté rapide et pratique, la lingerie très sexy attire particulièrement les hommes, notamment au mois de décembre: les ventes triplent en cette période de l’année.»

Le site multimarque Dessus-Dessous, précurseur avec presque 10 ans d’existence, reçoit 63’000 visiteurs par mois, qui consultent près d’un million de pages. «Nos ventes ont doublé depuis 2006, indique le webmaster Marc Candalo. Nous comptons à présent entre 20 et 50 commandes par jour.» Pour l’enseigne, qui possède également des magasins en France, les hommes figurent aujourd’hui parmi leurs plus fidèles acheteurs. «Près de 35% de notre clientèle online est masculine, alors qu’on voit très peu d’hommes dans les boutiques.»

La célèbre marque Aubade, que l’on trouve déjà sur le Web grâce aux shops multimarques, prévoit d’ailleurs de lancer sa propre e-boutique d’ici la fin de 2009. «Aujourd’hui, confie Aurélie Couveret, responsable de la communication du groupe français, ne pas offrir ce service représente un réel handicap.»

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