LATITUDES

Une pilule pour ne pas grossir

Une équipe de chercheurs lausannois a démontré sur des souris l’efficacité d’une substance contre l’obésité.

«Malgré un régime très riche en graisses, les souris traitées n’ont pas pris un gramme, se réjouit le professeur Johan Auwerx, alors que le poids des autres a doublé en douze semaines…» Plus étonnant encore, la nouvelle molécule, qui répond au nom de SRT1720, augmente les capacités musculaires chez les rongeurs sains: ils peuvent courir jusqu’à deux kilomètres, soit deux fois plus que normalement.

Récemment arrivé à l’EPFL, de l’Université Louis Pasteur à Illkirch en Alsace, le chercheur avait déjà démontré en 2006 l’efficacité du resveratrol, une substance trouvée dans le vin rouge, qui empêche de grossir. Avantage de la nouvelle molécule: elle est bien mieux ciblée, et donc plus efficace, ce qui permettra de réduire les doses et les effets secondaires.

«Il faudrait boire 70 000 bouteilles de vin par jour pour ressentir les bénéfices du resveratrol…», indique avec malice le scientifique. Si la nouvelle substance n’est pas encore prête pour l’homme, le resveratrol est déjà passé en étude clinique contre le diabète de type II et pourrait arriver sur le marché d’ici à cinq ans. De nombreuses autres maladies liées à des déficiences du métabolisme, comme par exemple parkinson, alzheimer, ainsi que les problèmes cardiovasculaires, pourraient bénéficier de ces découvertes.

Sportifs et… oisifs

Elaborée en collaboration avec Sirtris, une entreprise rachetée par le groupe GlaxoSmithKline, la nouvelle molécule stimule la combustion de graisses. Elle active la production d’un enzyme qui fait croire au corps qu’il est sous-alimenté. Ce dernier puise alors dans ses réserves et brûle davantage de lipides. Avant même de soigner, la substance miracle soulève déjà des interrogations éthiques. «J’ai reçu des centaines de mails de sportifs qui voulaient savoir si ce produit pourrait leur être utile pour augmenter leurs performances, raconte le chercheur. Mais la molécule n’est efficace que chez des individus peu entraînés, car les athlètes ont déjà un métabolisme optimal.»

Si Johan Auwerx souligne que son but est «d’améliorer la vie des patients, pas de la prolonger», il n’élude pas les questions soulevées par ses travaux: «Je sais que mes recherches pourraient peut-être un jour permettre l’apparition d’une nouvelle génération d’oisifs…» Affalés sur leur canapé, ils pourraient se bourrer de chips assaisonnées à la SRT1720 sans prendre un kilo.

——-
Une version de cet article est parue dans L’Hebdo.