KAPITAL

Employés de banques: opération reconversion

Les suppressions de postes dans le secteur bancaire encouragent les changements de filière. Avec quelles perspectives? Enquête.

Les milieux bancaires se préparent à une année tragique. A elles seules, UBS et Credit Suisse prévoient la suppression de plus de 3’000 postes sur le territoire national ces prochains mois. Et chez la concurrence, le climat n’est pas à l’embauche… Ces conditions difficiles contraignent une partie du personnel à sérieusement envisager un changement de secteur, même au prix de fortes réductions de salaire.

Avec quelles perspectives? «Les cadres peuvent se diriger dans la trésorerie, le consulting, la formation ou les relations avec les investisseurs, que ce soit au sein de grandes structures ou dans l’industrie, indique Heather Steele, responsable du secteur finance chez Adecco. Les employés avec moins de spécialisation, notamment dans le back office, peuvent tenter leur chance dans les assurances, la vente, l’administration ou le service à la clientèle.»

Le personnel bancaire peut miser sur des caractéristiques fort appréciées dans ces secteurs, telles que la discrétion ou le sens du détail: «Les employés du front office peuvent également mettre en avant leurs compétences commerciales ou leur capacité d’analyse, ceux du back office la précision, la tenue de délais ou une certaine aisance avec les chiffres.»

Beaucoup d’employés, présents depuis de nombreuses années dans les entreprises, devront réapprendre à se mettre en valeur sur le marché du travail. Les grandes banques préparent à leur attention des programmes d’accompagnement spéciaux. Credit Suisse (entre 600 et 650 suppressions de postes, 3% de l’effectif total en Suisse) prévoit des formations et des bilans de compétences, de même que la possibilité d’une mise à jour des connaissances linguistiques par le biais d’un financement total ou partiel.

«Les mesures décidées se déclinent en trois points: exploiter au mieux les possibilités à l’interne, geler les embauches et fournir un service personnalisé en fonction des profils», résume le porte-parole de la banque Jean-Paul Darbellay. Prévues d’ici à la fin du premier semestre, les coupes concerneront en priorité les activités d’investissement et les services d’assistance s’y rattachant (support, administration, ressources humaines, service juridique, communication ou marketing). Les personnes en contact direct avec la clientèle se voient, dans leur ensemble, moins touchées.

De son côté, UBS (2’500 suppressions prévues dont 1’200 à 1’500 licenciements) a conclu un accord de partenariat social avec l’Association suisse des employés de banque (ASEB) et la Société suisse des employés de commerce (SSEC). Des mesures d’aide — bilan personnalisé, préparation du CV, recours à des plateformes spécifiques de recherche d’emploi — s’appliquent à tous les collaborateurs, cadres et employés.

Un montant de 6’000 francs pourra être demandé par les collaborateurs pour financer des mesures «incitatives» (formations, reconversions externes ou reclassements collectifs) jugées utiles par l’employeur.

Quel que soit le cas de figure, une reconversion ne s’improvise pas: «Je conseille vivement de toujours tenir son CV à jour, d’agir rapidement mais sans précipitation et de réaliser un bilan de compétences afin de connaître ses forces et ses faiblesses», souligne Heather Steele.

Et tous les plans de carrière doivent être envisagés: «Nous avons nous-mêmes engagé des employés venant du back office en tant que conseillers. De par leurs connaissances et leur expérience dans le secteur bancaire, ces personnes remplissent des conditions idéales pour devenir des consultants.»

Riccardo Barilla, 46 ans, n’a pas attendu la crise pour changer de voie. Il a quitté la banque Syz en 2004 pour se reconvertir, en compagnie de sa femme — également ex-banquière — dans le domaine de l’art: «Nous souhaitions surtout pouvoir passer plus de temps ensemble. Bien sûr, améliorer notre vie privée a nécessité de faire pas mal de sacrifices matériels. C’est un luxe que tout le monde ne peut pas se permettre.»