LATITUDES

S’habiller sur mesure, une élégance accessible

Chemises, costumes… Les hommes sont toujours plus nombreux à opter pour le sur-mesure, pas forcément plus cher. De nouvelles offres se développent. Présentation.

Porter une chemise adaptée à sa morphologie plutôt qu’un modèle de marque, parfois plus cher et toujours moins bien ajusté? Une nouvelle clientèle, composée majoritairement de cadres en quête d’un look personnalisé ou d’une prestation rapide et efficace, se tourne vers le sur-mesure.

Plusieurs professionnels se sont lancés sur ce marché, à l’image d’Alexandre Ghassem, qui a repris l’an dernier le chemisier suisse Lorelli. Par le biais de sa nouvelle société, Bko & Cie, l’entrepreneur de 59 ans mise sur le confort d’achat et la personnalisation propre au sur-mesure. Chaque nouveau client est pris en charge par une styliste ou une chemisière qui réalise un patron adapté à ses mensurations. Ils peuvent ensuite passer leurs commandes par téléphone en demandant un tissu spécifique. Une équipe reste à disposition pour des réparations et peut se déplacer au domicile ou au bureau du client.

Tarif? 250 fr. pour le patron, puis 350 fr. en moyenne pour une chemise. Autre option: les chemises en demi-mesure (que l’artisan appelle «italiennes» en raison de la provenance du tissu) qui reviennent à 275 fr. pièce (210 fr. dès 2 pièces). «Le client essaie nos modèles dans notre show-room, puis la styliste décide des modifications à apporter», détaille Alexandre Ghassem, dont l’objectif est de passer des quelque 600 chemises par an que réalisait Lorelli à une production annuelle de 900 chemises sur mesure et 1000 chemises «italiennes».

Au Bon Génie, on constate un rajeunissement de la clientèle, notamment grâce à des offres de costumes en demi-mesure dès 1200 francs. Les femmes, pour leur part, ne sont pas totalement absentes du secteur (elles représentent 30% des ventes chez Bko & Cie). Mais le sur-mesure vise avant tout les hommes: «Ils aiment moins faire les magasins ou ne trouvent pas le temps», constate Ivo Faienza, qui propose ses services à domicile sous l’appellation de Monsieur Maurice. Outre des chemises (entre 155 et 185 fr. selon le tissu), il fait réaliser en France ou en Italie des costumes sur mesure pour environ 1000 fr. pièce.

Gianfranco Albertella, qui vient de lancer l’année dernière sa société baptisée Monogramme (costumes sur mesure dès 900 francs), relève que les hommes recherchent des produits de qualité, non seulement d’un point de vue fonctionnel, mais aussi en termes d’éthique ou d’écologie. «Beaucoup d’hommes préfèrent se démarquer par des objets uniques et personnalisés», dit-il.

Mais l’essor actuel du sur-mesure n’est pas uniquement dû à une recherche de distinction. Le sociologue de la mode Frédéric Monneyron y voit trois causes: «Tout d’abord, les populations occidentales grossissent et certaines personnes n’arrivent pas à s’habiller avec les produits des marques. Ensuite, l’une des définitions du luxe est qu’il dure. Dès lors, le sur-mesure peut paradoxalement revenir moins cher qu’un vêtement de marque. Enfin, le costume veste-pantalon des hommes est peu soumis aux changements de la mode.» Pragmatiques, les hommes réalisent avec raison qu’un costume bien coupé est un meilleur investissement qu’un modèle hors de prix — et moins bien ajusté — d’une boutique de la rue du Rhône.
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Une version de cet article est parue dans l’Hebdo.