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La fable boursière des Bulls et des Bears

Vous ne détenez pas encore d’actions? Alors que les titres boursiers se démocratisent à grande vitesse? Et que les sites qui permettent d’effectuer soi-même les transactions prolifèrent sur le Web en attirant toute une nouvelle clientèle de boursicoteurs? Quoiqu’il en soit, lorsque vous ferez le grand saut, c’est-à-dire dans peu de temps, vous devrez vous initier au jargon anglo-saxon et découvrir une métaphone animalière incontournable: les Bulls et les Bears (les taureaux et les ours).

L’analogie n’a rien d’évident. Le Bull décrit un marché boursier en hausse, tandis que le Bear s’applique à un marché en baisse. L’origine de l’expression remonte au début du XVIIIe siècle. A l’époque, aux Etats-Unis, les trappeurs faisaient des paris sur des combats d’animaux d’un genre tombé en désuétude. Il s’agissait de lâcher une meute de chiens sur un ours, un taureau ou une autre bête féroce.

Pris dans la mêlée, les taureaux foncent tête baissée et projettent les molosses en l’air avec leurs cornes. Un mouvement comparable au graphique d’un marché haussier. A l’inverse, l’ours plaque ses adversaires au sol à vigoureux coups de pattes, ce qui symbolise un marché baissier.

De plus, au XVIIIe siècle toujours, les grossistes de peaux d’ours passaient pour particulièrement pressés de vendre leur marchandise au meilleur prix, ce qu’ils faisaient même avant que l’animal n’ait été tué…

Mais revenons à la bourse. Historiquement, le dernier vrai «bearish market» remonte au krach du 9 octobre 1987. L’indice américain Dow Jones s’effondre ce jour là subitement de 30%. La veille encore, les marchés sont en pleine euphorie. Le 25 août, le Dow Jones pulvérise son record. Et tout le monde est persuadé que l’indice va continuer son ascension. Un trader déclare dans l’édition du Wall Street Journal du 26 août 1987: «Sur un marché comme celui-ci, il ne peut y avoir que de bonnes nouvelles. Il va de soi que le marché va encore grimper.»

Deux mois plus tard, les golden boys ruinés se jettent du haut des buildings. Pour profiter au maximum de la hausse des marchés, il est courant d’emprunter de l’argent contre la valeur de ses actions pour acquérir des titres supplémentaires. Evidemment, ce n’est une bonne idée que lorsque les cours montent. Si les marchés chutent, les pertes sont démultipliées. Le créancier exige de nouvelles garanties. Le débiteur est forcé de vendre ses actions. Et les cours plongent encore davantage. C’est le cercle vicieux.

Le marché boursier est éminemment cyclique. Il finit toujours par faire succéder un «bullish market» à un «bearish market». A moins que ce ne soit le contraire. Entre 1995 et 1998, l’indice Dow Jones a doublé, passant de 4000 à 8000 points. Cela signifie que pour 1000 francs investis en 1994 dans les sociétés qui composent le Dow Jones, on détient le double à peine quatre ans plus tard.

Les Bulls et les Bears, ce sont aussi des emblèmes, des signes de reconnaisance entre golden boys. Il est du meilleur goût de porter ces animaux en boutons de manchettes. Le modèle se décline en or 14 ou 18 carats chez The Banker’s Collection .

Sur Internet, on trouve l’ours et le taureau en presse-papiers, sur des montres, des coussins, des T-shirts. Une société vend cigares et alcools sous la marque «Bull and Bear». Et pour les plus mordus, un artiste américain nommé James Joseph Marsico réalise carrément des sculptures de bronze à l’effigie des deux animaux.