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A quoi tient le bonheur?

Pour répondre à cette question essentiellement subjective, les chercheurs ont quelques indices, qui vont de la génétique à la religion.

Nous voulons tous être heureux. Mais s’agit-il d’une question de choix ou de destinée? Voici l’évaluation de huit des facteurs les plus courants, selon Meik Wiking et Jon Sigur Wegener, deux experts danois.

Santé
Aucune surprise ici: les sujets en bonne santé se disent plus heureux. Et, réciproquement, le bonheur semble préserver la santé. Selon une étude de 2011 menée à University College London, les membres du tiers le plus heureux connaissaient une mortalité à cinq ans inférieure de 35% à celle du tiers inférieur. Ce n’est pas tant le fait d’être bien portant qui rend heureux; ce sont les ennuis de santé qui rendent malheureux, surtout lorsque la société stigmatise certaines pathologies comme l’obésité. Avoir des amis ou des proches malades a également un impact négatif.

Génétique
«Nous ne pouvons l’affirmer, mais il se pourrait que nous naissions plus ou moins doués pour le bonheur», déclare Meik Wiking, directeur de l’Institut de recherche sur le bonheur de Copenhague. D’après une étude de 2014 menée par Andrew Oswald de l’Université de Warwick, certains pays bénéficient d’une prédisposition génétique au bien-être psychologique. Une enquête à grande échelle (voir La carte mondiale du bonheur p. 36) a ainsi révélé que le Danemark est la nation la plus heureuse. Or, les pays aux caractéristiques génétiques comparables occupent le haut du classement – et le phénomène est également sensible chez les Américains d’origine danoise… Par ailleurs, les études menées sur des jumeaux monozygotes ont révélé des niveaux équivalents de bien-être dans la vie, indépendamment des circonstances. Un domaine de recherche assez nouveau: Andrew Oswald se déclare prudent.

Travail
Le travail est déterminant, notamment au nord de l’Europe et en Amérique du Nord. Intimement lié aux relations sociales, il aide les individus à se définir. «Ceux qui travaillent sont plus heureux que les autres», affirme Meik Wiking. Même avec un soutien économique, le chômage déstructure, s’accompagne d’un sentiment de perte d’identité et limite les échanges sociaux.

Argent
«C’est l’un des sujets les plus controversés de la recherche sur le bonheur», admet Meik Wiking. Il reste que les pays riches sont en moyenne plus heureux que les pauvres. Pourtant, leur bonheur n’augmente pas proportionnellement à leur richesse, contrairement aux situations rencontrées dans les pays plus pauvres. L’influence de l’argent a donc ses limites, y compris sur le plan individuel. «Si riches que vous soyez, vous n’éviterez pas les embouteillages», déclare Meik Wiking.

Chimie
«Sans chimie, pas de bonheur», affirme Jon Wegener, neuroscientifique à l’Ecole de commerce de Copenhague. La sérotonine, un neurotransmetteur, stabilise notre humeur au point que son déficit peut conduire à la dépression. La dopamine est liée aux pics d’euphorie. L’ocytocine facilite la naissance de liens forts avec nos proches, en développant le sentiment de sécurité et de confiance. Enfin, certaines cellules cérébrales, les neurones miroirs, nous permettent d’imiter ceux qui nous entourent, favorisant l’empathie et répondant à notre profond besoin d’appartenance.

Religion
On a longtemps expliqué par la foi les bons résultats des enquêtes sur le bonheur des individus. Les scientifiques estiment désormais qu’ils ne sont pas liés à la religion en elle-même, mais à un sentiment d’appartenance. «Se rendre dans un lieu de culte signifie que l’on fait partie d’un groupe», affirme Meik Wiking. «Des études américaines montrent que vivre dans un lieu fréquenté par des croyants rend plus heureux, même si l’on est athée.»

Sens de la vie
Connaître le sens qu’on accorde à l’existence a une incidence, mais uniquement chez ceux qui sont déjà heureux. «Avoir des objectifs contribue au bonheur en donnant un sens à l’existence», explique Meik Wiking.» S’enthousiasmer a un effet positif. Et les professionnels libéraux, davantage focalisés sur leur vie quotidienne, affichent de meilleurs résultats.

Relations
Les liens sociaux sont essentiels; preuve en est qu’en dépit de la hausse du taux de divorce, les personnes mariées s’en sortent mieux que les célibataires. L’«angoisse du choix» et l’excès d’options nuisent au bonheur. «Il est bon de s’engager», explique Meik Wiking.
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Qu’est-ce que le bonheur?

En sciences, le bonheur est généralement défini comme un «état de satisfaction globale dans la vie», même si beaucoup l’associent aux pics d’euphorie, ces brefs moments de «bonheur maximum». L’estimation de ce bien-être repose sur deux éléments. La composante analytique («cognitive») se mesure par des questions qui permettent une évaluation globale («Dans quelle mesure êtes-vous satisfait de votre vie en général?») Des questions comme «A quel point étiez-vous heureux hier?» concernent une composante plus affective pour mieux quantifier le bonheur quotidien. Daniel Kahneman, connu pour son travail sur les «biais cognitifs», avance pourtant dans Thinking Fast and Slow (2011) que les individus se jaugent généralement assez mal. Le psychologue israélo-américain et Prix Nobel d’économie 2002 soutient que l’auto-évaluation de la douleur ou du plaisir correspond rarement au vécu réel en raison d’une déconnexion entre l’«expérience propre» et le «rappel de soi». Il insiste sur l’«illusion de concentration»: «Rien dans la vie n’est aussi important que ce qui vous vient à l’esprit au moment où vous y réfléchissez». De quoi compliquer longtemps encore la recherche de la recette du bonheur…

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Les experts

Meik Wiking
Directeur de l’Institut de recherche sur le bonheur, Danemark

Jon Sigur Wegener
Neuroscientifique du Groupe de recherche en neurosciences de la décision, Ecole de commerce de Copenhague
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Une version de cet article est parue dans le magazine Technologist (no3).