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Du mou dans le SwissLeaks

Lenteur suspecte de la justice suisse, informateur méprisé, pratiques journalistiques contestées: en Suisse, la lutte contre la fraude fiscale n’est pas encore un combat glorieux et assumé.

Donc le chevalier plus blanc que blanc Hervé Falciani s’est dit prêt à se rendre en Suisse pour participer à l’enquête contre son ex-employeur HSBC dont il avait dénoncé le rôle dans un gigantesque réseau d’évasion fiscale.

Falciani de retour en Suisse? Un peu comme si Gorge Profonde s’était invité en plein Watergate à une garden-party chez Nixon.

Blanc le chevalier, mais pas si téméraire puisqu’il a mis comme condition à son retour au pays des banques l’octroi d’un sauf-conduit lui garantissant de ne pas être arrêté.

Car oui dans la riante et verte Helvétie on n’a pas d’état d’âme à jeter les Robin des Bois en prison surtout s’ils sont un peu voleurs comme tout Robin des Bois qui se respecte et comme le fut Falciani.

Voleur et rapporteur, puisque dérober les données des clients fraudeurs d’HSBC c’est une chose, les rendre publiques une autre et que personne n’aime les cafteurs. Même quand ils sont mus par la seule volonté de voir triompher la justice et la vérité, ce qui est loin, très loin d’être toujours le cas. Hervé, pourquoi tu tousses?

Et puis aux yeux de l’opinion publique locale, ce que dénonce Falciani et la manière dont il l’a fait, heurte les régions les plus enfouies d’un patriotisme bien compris qui place haut le respect des banques et la loyauté de l’employé envers l’employeur.

Même si cracher sur la finance est devenu en Suisse comme ailleurs un sport des plus partagés, le redresseur de fraudes Falciani aura de la peine à endosser la tunique trop immaculée pour lui du super héros. Surtout avec cette gueule de traître font déjà remarquer mon coiffeur et ma concierge.

Enfin, et même s’il entre sans doute dans ses analyses un brin de jalousie professionnelle, difficile de donner complètement tort à l’inimitable rédactrice en chef de Bilan, Myret Zaki, faisant remarquer que la part de l’évasion fiscale passant par la Suisse ne représente qu’une goutte d’eau dans l’océan mondial de la fraude. Et que la glorieuse opération journalistique intitulée SwissLeaks ressemble un peu trop à un service commandé au profit d’une dizaine d’Etats et majoritairement de l’Etat français. Un Etat aux abois obsédé par des caisses vides que l’évasion fiscale n’est de loin pas la seule à avoir asséchées.

Pas sûr qu’à l’heure où chez nous on se tâte pour savoir s’il faut célébrer les 500 ans de la raclée infligée par le roi de France aux Confédérés à Marignan, SwissLeaks et la figure de Falciani contribuent à tirer définitivement un trait sur le complexe misérable, où se mêle autant d’infériorité que de supériorité, qu’entretiennent les Suisses vis à vis de leurs impertinents voisins français.

Sans parler de la mise en pâture gratuite et à d’uniques fins bassement publicitaires, d’infimes mais très médiatiques poissons, façon Gad Elmaleh et ses 80 000 euros. Qui n’a jamais essayé de payer un peu moins d’impôt lui lance le premier fifrelin.

Tout ceci évidemment n’apporte pas une ombre de justification à la pratique peu ragoûtante de l’évasion fiscale. Ni à la lenteur suspecte d’une justice suisse plus éveillée lorsqu’il s’agit de traquer une délinquance moins propre sur elle.

Une lenteur que le Procureur général de la Confédération Michael Lauber explique tranquillement dans les colonnes de l’Hebdo: «La situation juridique de ces données est très délicate. Elle sont volées et donc pas utilisables en justice». Et lui, n’est-ce pas, magistrat scrupuleux ne peut quand même pas s’amuser à «ouvrir des enquêtes uniquement sur la base d’articles de presse ». Et de se désoler: «La situation est de facto une forme d’impunité des fraudeurs». Puis de rassurer: «Ne croyez pas que nous restons les bras croisés».

On se demande bien ce qui a pu lui faire penser ça.