TECHNOPHILE

La grenade philosophale

Le fruit rouge symbolisait la vie éternelle. Des chercheurs suisses ont révélé comment l’une de ses molécules freine le vieillissement.

Manger de la grenade pourrait être le régime miracle contre le vieillissement. Des chercheurs de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) démontrent comment une molécule de la grenade transformée par l’intestin permet de lutter contre la dégénérescence musculaire.

La grenade, un élixir d’immortalité?
Les vertus du jus de grenade pour la santé sont reconnues depuis l’an 5000 av. J.-C. par l’ayurvéda indienne. La science moderne ne parvenait pas à expliquer d’où provenaient ces bienfaits, jusqu’à ce que Johan Auwerx et son équipe de l’EPFL se penchent sur la question avec la start­-up lausannoise Amazentis, active dans les biotechnologies médicales. Ils ont nourri des lombrics et des souris d’urolithine A, une molécule produite par les bactéries intestinales à partir d’une autre présente dans le fruit. Ils ont découvert qu’en petite quantité, l’urolithine A pouvait allonger la durée de vie des vers de terre de 45% et améliorer de 42% l’endurance de rongeurs âgés.

Comment allonge-t-elle la durée de vie?
L’urolithine A favorise la mitophagie, un mécanisme d’entretien qui recycle les mitochondries (usines énergétiques des cellules) déficientes et permet aux cellules de se protéger contre l’une des principales causes de vieillissement. «L’urolithine A est le seul composé connu qui accélère ce processus de nettoyage», indique Johan Auwerx. Amazentis espère être autorisée à l’utiliser dans le traitement contre la dégénérescence musculaire chez les personnes âgées. La start-up a déjà mené des tests de toxicité concluants et prépare sa première étude d’efficacité sur les humains.

Si le fruit contient la solution, pourquoi en vendre des comprimés?
«Le microbiome intestinal varie selon les patients, explique Johan Auwerx. Sans flore intestinale adéquate, pas d’urolithine A et boire du jus de grenade n’est en général pas suffisant.» Pendant qu’Amazentis cherche à commercialiser la molécule en tant que nutraceutique — un ingrédient naturel bénéfique pour la santé –, Johan Auwerx et son équipe s’efforceront de trouver la dernière pièce du puzzle: «Il sera essentiel d’identifier la cible cellulaire exacte de la molécule pour mettre au point de meilleurs traitements.»
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Une version de cet article est parue dans le magazine Technologist (no 10).

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