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Donner des leçons, c’est si bon

Trumperies et affaire Fillon: les sermons pleuvent du haut de nos montagnes. Lin blanc et probité candide restent les vieilles mamelles de la Suisse.

C’est l’avantage de compter pour beurre et d’avoir fait de la neutralité son ADN: pouvoir donner tranquillement des leçons au monde entier. Surtout quand chez soi il ne se passe rien ou si peu de choses. A part de temps à autres quelques initiatives xénophobes, à but strictement électoralistes, que chacun sait inapplicables — y compris leurs propres initiateurs — mais que le peuple souverain a l’outrecuidance de valider tout aussi régulièrement.

C’est donc drapé, sinon de lin blanc, du moins de probité candide, que le ministre des affaires étrangères Didier Burkhalter peut tancer les Amériques. Enfin surtout les Etats-Unis à la sauce Trump: «Nous nous sommes toujours opposés à la discrimination des êtres humains en raison de leur religion ou de leur provenance. En ce sens, le décret pris aux USA va clairement dans la mauvaise direction.»

En cause bien sûr l’interdiction provisoire faite par le nouveau seigneur de la Maison Blanche aux ressortissants d’une poignée de pays à majorité musulmane et en guerre d’entrer sur le territoire étasunien.

De quoi donc horrifier Didier Burkhalter. On peut être fier que le ministre d’un si insignifiant pays sache d’un savoir si sûr où est la bonne direction.

Les mauvais esprits — il y a toujours des brebis galeuses au sein des troupeaux les plus propres — pourraient certes avancer quelques objections naturellement incongrues. Dire qu’au nom d’un autre grand principe, voulant que chacun balaye devant sa porte, le ministre Burkhalter, avant son sermon du haut de la montagne, aurait pu commencer par suggérer que son pays, la Suisse, sans tache et sans reproche, accueille un peu plus de Syriens, d’Irakiens, de Yéménites, de Somaliens, d’Iraniens, de Libyens et de Soudanais qu’elle ne le fait actuellement. Puisque cela est tellement juste, et va tellement dans la bonne direction.

Faut-il pour autant, comme une ancienne vedette de La Première réfugiée au bout du Lac, faire perfidement remarquer sur son blog que personne ne gronde les seize pays qui interdisent depuis des lustres l’entrée sur leur territoire aux détenteurs d’un passeport israélien? Parmi lesquels, c’est évidemment une coïncidence, la Syrie, la Libye, le Soudan, le Yémen, l’Iran, l’Irak…

N’entrons pas dans ce jeu-là, d’autant moins que donner des leçons à tous les pécheurs du monde est un privilège auquel nous serions bien bêtes de renoncer.

Voyez les commentaires goguenards et jouissifs que le «Penelope Gate» nous fait verser sur la République française et son abject fonctionnement népotique. Tant pis si quelques enquêtes, comme celle de la Tribune de Genève et de 24 heures, ont montré que chez nous aussi et avec bien moins de contrôles, nos parlementaires fédéraux disposaient d’une coquette enveloppe — 33’000 francs — pour rémunérer des collaborateurs. Et que quelques-uns puisaient aussi dans le vivier familial.

Avec des excuses et des arguments dignes du meilleur Fillon. «J’ai été élu par surprise, j’ai dû m’organiser très vite», explique ainsi le PLR argovien Matthias Jauslin pour justifier l’emploi de sa fille. Le PLR saint-gallois Walter Müller trouve encore plus fort pour rendre inattaquable le fait de salarier sa femme: «Elle s’occupe même de la façon dont je m’habille. Il est plus que mérité qu’elle soit défrayée pour son travail.»

Quant à la socialiste genevoise Liliane Maury Pasquier, c’est avec les yeux impartiaux et objectifs d’une mère qu’elle juge froidement sa collaboratrice parlementaire de fille: «Elle est excellente!»

D’ailleurs comme le dit le radical valaisan Philippe Nantermod, qui n’emploie pas de membre de sa famille, on pourra trouver «un peu malsaine la polémique autour de cette affaire Fillon». Le détournement d’argent public à des fins personnelles, c’est en effet tellement plus sain.