Milosevic préparerait-il son pays à la paix? C’est Die Welt qui pose la question. En Suisse, la SonntagsZeitung s’interroge: le bombardement de l’ambassade de Chine serait-il un formidable coup monté?
La presse dominicale dans son ensemble tente d’analyser les conséquences du bombardement par l’OTAN de l’ambassade de Chine. A l’image de la SonntagsZeitung de Zurich, tous les titres s’accordent à décrire cette cible comme la «pire possible d’un point de vue diplomatique». D’autant qu’il s’agit non pas d’une erreur de jugement d’un pilote ou d’une défaillance technique, mais d’une méprise stratégique. Et c’est bien sur le plan diplomatique que les conséquences vont se faire sentir: la Chine dispose du droit de veto au Conseil de Sécurité et il y a fort à parier qu’elle pèsera de tout son poids en faveur d’une solution négociée avec le pouvoir serbe et le déploiement de forces onusiennes au Kosovo.
Le changement dans le discours de Bill Clinton, cité par Le Monde, est révélateur: empêtré dans ses excuses au gouvernement chinois, il n’est plus en mesure de soutenir la ligne dure de l’attaque aérienne. La rhétorique présidentielle vise plutôt à satisfaire le plus de monde possible en projetant d’établir des «présences de sécurité» au Kosovo «avec l’aval des Nations unies» et une forte présence de la Russie.
Cette implication soudaine de la Chine tombe au meilleur moment pour Milosevic. A tel point que la SonntagsZeitung se demande s’il ne pourrait s’agir d’un formidable coup monté, sans toutefois étayer sa thèse d’éléments nouveaux. Avec quelques jours de recul, le jeu de Milosevic se révèle si brillamment mené qu’une telle éventualité ne paraît pas incongrue.
La libération des soldats américains est survenue à point pour convaincre l’opinion publique que Milosevic restait un interlocuteur sensé. La mise en scène de cette libération, photos de groupe avec Jesse Jackson à l’appui, va aussi dans ce sens.
Une autre «libération», celle d’Ibrahim Rugova, lui permet de fournir à la communauté internationale l’intermédiaire idéal pour mener des négociations. Mais le retournement se travaille aussi à l’intérieur: «Milosevic prépare-t-il son pays à la paix?» Un article publié par Die Welt explique que même le quotidien de boulevard serbe «Nedeljni Telegraf» ne doute plus d’une solution pacifique: il prévoit la signature d’un traité de paix et la fin des bombardements pour le 15 mai.
Ces efforts pourraient mettre fin à sept semaines d’une offensive aérienne qui restera dans les mémoires comme le plus grand déploiement de forces armées en Europe depuis la fin de la guerre.
