C’est une star de la presse suisse qui dirigera la rédaction du plus petit quotidien romand. Le journaliste bilingue Peter Rothenbühler va quitter Zurich pour rejoindre Edipresse
«Il est tellement bien que je n’arrive pas à y croire!» Michel Zendali, rédacteur en chef du Matin Dimanche, ne parvient pas à cacher son admiration. Après plusieurs mois d’embrouilles, la direction du groupe Edipresse a réussi un joli coup. Elle annoncera jeudi matin officiellement la nomination de Peter Rothenbühler à la rédaction en chef du Matin.
Parfaitement bilingue, ce Biennois de 51 ans a fait ses armes dans la presse populaire: en onze ans à la rédaction en chef du Schweizer Illustrierte (équivalent alémanique de L’Illustré), il a fait monter le tirage de 170’000 à 250’000 exemplaires. Son style impertinent et son regard acerbe sur les différences culturelles de la Suisse se lisent avec délectation dans la chronique qu’il tient, encore pour quelques semaines, dans Le Temps.
Dernièrement, Peter Rothenbühler a occupé le poste de directeur des programmes de la chaîne privée zurichoise Tele24 avant de retourner chez l’éditeur Ringier. Il y a développé un nouveau magazine de consommation de luxe, dont le lancement a été retardé en raison de la conjoncture, mais qui reste dans les tiroirs. Rothenbühler dirige actuellement le bimensuel santé Gesundheit Sprechstunde, qui touche 500’000 lecteurs.
Compte tenu du délai de résiliation de son actuel contrat, ce n’est qu’en mars 2002 qu’il prendra ses fonctions au Matin.
Sa mission ne sera pas facile: le quotidien romand traverse une période de flou depuis des mois. Au beau milieu de l’élaboration de la nouvelle formule (demi format), son rédacteur en chef Daniel Pillard avait été brusquement limogé, puis remplacé de manière intérimaire par le directeur des publications d’Edipresse Suisse Théo Bouchat.
«Je suis très content que l’on ait trouvé une solution, dit Théo Bouchat. Après un lancement réussi, la nouvelle formule doit encore évoluer. Le Matin doit rester un journal populaire de qualité et conserver son identité proche des gens.»
Compte tenu des difficultés connues du poste de rédacteur en chef (rédaction encroutée et hostile au changement, baronnies internes, rivalités entre l’équipe du dimanche et celle de la semaine), les candidats ne se pressaient pas au portillon. Une seule postulation interne, celle de Denis Pittet, actuel rédacteur en chef adjoint du quotidien, restait en lice.
Depuis le lancement de la nouvelle formule en octobre dernier, le tirage du Matin est en légère progression. «Nous avons augmenté les ventes de 2000 numéros sur les trois derniers mois, pour passer à 66’000 exemplaires», poursuit Théo Bouchat.
Le Matin Dimanche solidifie quant à lui sa position de numéro un de la presse romande avec 600’000 lecteurs. Son prix passera à 4 francs en janvier, tandis que son concurrent Dimanche.ch, partenaire de Largeur.com, sera vendu 2 francs.
A Peter Rothenbühler de décider s’il veut conserver le cloisonnement entre Le Matin semaine et Le Matin Dimanche, ou au contraire unir les deux rédactions sous une direction et une culture commune. Dans le sous-sol de la grande tour lausannoise, où se trouve la rédaction, c’est surtout cette dernière option – qui imposerait un changement de fonctionnement – que l’on craint…
