LATITUDES

Le bénévolat, ça peut rapporter gros

La question d’une «monétarisation» du travail bénévole sera discutée à la fin mai à Lucerne. Un débat qui englobe le logiciel open-source et les professionels-amateurs.

«Je recycle l’argent que je ne veux pas», clame Nicole à chaque fois qu’elle offre un verre avec les 30 francs touchés pour un après-midi passé avec des personnes âgées. Recevoir une somme, même dérisoire, malmène sa conscience et l’extrait du don dans lequel elle avait décidé de se cantonner.

Gisèle s’occupe une fois par semaine d’un enfant handicapé. Sans scrupule, elle accepte un billet de vingt francs qu’elle voit comme un signe de reconnaissance transformé sur le champ en un bouquet de fleurs. Qu’elle s’offre! «Pour donner, il faut aussi recevoir», commente-t-elle avec un sourire un rien narquois.

Francisco, informaticien, suit d’un œil très critique le devenir de l’«open source»: «Tant de savoir réuni, d’intelligence collective gratuitement à disposition, qui risque bien de tomber dans le mercantilisme… J’hésite à continuer. Les règles initiales ne sont plus respectées. Je ne veux pas être le dernier naïf.»

Trois personnes, trois types de bénévolat, trois rapports à l’argent bien distincts qui seront au cœur des débats du 29 mai au 1er juin 2005 à Lucerne. Le colloque organisé par l’Université européenne du volontariat portera en effet sur l’influence croissante de l’argent dans le domaine du volontariat qui, jusqu’ici, avait pu être préservé de son emprise.

Créée en 1993, l’Université européenne du volontariat a pour modèle les universités itinérantes du Moyen Age. Elle invite à réfléchir à l’évolution du travail des volontaires. Un sujet d’actualité qui touche tous les domaines du travail non rémunéré que sont les associations sportives ou de handicapés, le développement de logiciel, la vie culturelle et éducative ou les rapports intergénérationnels.

S’il était payé à un tarif horaire de 36 francs, le travail bénévole effectué en Suisse se monterait à plus de 20 milliards de francs. Un Suisse sur quatre fournit du travail bénévole. Pour l’essentiel, les bénévoles sont des personnes bien insérées socialement. Enfin, les bénévoles qui se vivent comme des «militants», se concentrent essentiellement dans le secteur d’intervention «défense des droits des personnes» (source: Action Bénévole).

«J’sais pas quoi faire! Qu’est-ce que je peux faire?» Du bénévolat, répond Jean-Pierre Fragnière, qui y voit un excellent médicament pour la santé physique et psychique même s’il ne fait pas la fortune de Roche. Si Paris a depuis peu son petit guide «Etre bénévole à Paris» (éd. Parigramme), la Suisse dispose elle d’un outil original, nommé «cialis 5mg lilly fta», une sorte de certificat de travail personnel, une «attestation de bénévolat».

Avec l’informatique sont nés de nouveaux bénévoles, identifiés sous l’appellation pro-ams, pour professionnels-amateurs. Des amateurs qui développent leur passion à un niveau professionnel en retirant leur satisfaction de la seule reconnaissance de leurs pairs. Mais l’apport gratuit de compétences pointues dans le développement de l’«open source» suscite de plus en plus de commentaires.

Ainsi cette réaction enregistrée suite à la création de Google Code, un site pour développeurs externes à Google: «Présenter l’open source comme une alternative à Microsoft et autres multinationales est louable. Mais que cela ne se transforme pas en une sorte d’utilisation du bénévolat à but lucratif. Google n’est pas une association, ou une fondation. Ce qui les intéresse, c’est de faire monter l’action Google à Wall Street. Or ce qui risque de se produire dans les entreprises de développement, c’est une externalisation du développement, non par sous-traitance, mais bien par des bénévoles
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Bénévoles oui, dupes non!